Charlotte à vélo

A propos du projet de ZTL (Zone à Trafic Limité) de Paris centre

Ma contribution à l’enquête publique – Mai 2024

Le projet de ZTL pour Paris Centre est tout à fait bénéfique pour plusieurs raisons :

  1. Le trafic de transit ne devrait jamais passer par les centres urbains, à commencer par le centre de Paris

Le trafic de transit est explicitement visé dans le projet de ZTL. Hors les centres urbains, très denses en piétons, ont vocation à laisser toute la place aux mobilités actives. Le trafic de transit vient donc ajouter une fonction routière à des quartiers historiques, touristiques et denses. Or cette fonction routière est difficilement conciliable avec l’espace urbain, forcément limité. Une voirie faite pour le transit routier verra forcément la place dévolue aux bus, aux vélos et aux piétons très réduite.

Paris Centre ne doit pas être un raccourci, ni une autoroute urbaine, ni un échangeur.

2) Une mesure non pénalisante pour le quotidien des Parisien.nes et des Francilien.nes

Le trafic routier parisien concerne  des déplacements quotidiens pour moins de 10% des ménages parisiens et de proche banlieue. Les ménages qui disposent d’une voiture appartiennent en premier lieu aux couches les plus aisées. Le trafic motorisé contribue à la quasi-totalité des émissions de gaz à effet de serre des transports, à la moitié de la pollution de l’air et occupe 50% de l’espace public.

L’excellente offre de transports en commun, doublée d’un réseau cyclable sécurisé – comme par exemple les pistes cyclables rue de Rivoli ou boulevard de Sébastopol – permet de se passer de la voiture individuelle pour les déplacements dans le centre de Paris. La ZTL permet des autorisations de circuler pour les usages motorisés définis, lorsqu’il n’y a pas d’alternative possible.

De plus la ZTL permet de réduire la circulation motorisée ce qui a un impact non négligeable pour la qualité de vie dans ladite zone : réduction du bruit, de la pollution, des émissions de gaz à effet de serre, désencombrement de la voirie

3) Les ZTL sont complémentaires et plus efficaces que les ZFE

Les ZTL sont des projets qui devraient se multiplier dans notre région, comme je l’ai proposé pour le Plan des mobilités 2030 de l’Ile de France. En effet, alors que la ZFE (Zone à Faible Émission) du Grand Paris avance lentement, la ZTL est un outil qui n’est pas utilisé dans notre région et qui permettrait de contribuer à la réduction de la circulation automobile dans les centres-villes.

Mieux centrées sur les usages et non sur les motorisations, les ZTL sont complémentaires voire même sont de vraies alternatives aux ZFE.

Les ZTL sont utilisées depuis des années en Italie.  En visant explicitement l’usage et non les catégories de motorisation, les ZTL permettent de réduire la circulation dans les centre-villes et donc de contribuer aux objectifs de réduction des déplacements motorisés, et aux objectifs de favoriser les modes actifs (marche et vélo), en diminuant les conflits et la place accordée aux voies circulées.

Elles permettent de mettre en place un contrôle efficace, tout en offrant d’énormes souplesses pour la gestion des ayant.e.s-droits.

La ZTL du centre de Paris sera donc une première dans notre région, qui amène à d’autres ZTL dans d’autres quartiers de l’Ile de France.

Quelques pistes d’amélioration pour la ZTL Paris centre

Cette enquête publique permet de pointer les points d’amélioration de cette ZTL, afin de la rendre plus efficace.

Ainsi :

La ZTL de Paris centre devrait être plus ambitieuse, à ce stade beaucoup trop d’usages sont permis ce qui fait qu’on attend simplement une réduction de 15% de la circulation automobile sur le Boulevard de Sébastopol, c’est trop peu et risque d’avoir un effet peu perceptible. Ainsi il est prévu d’accepter les déplacements motorisés dans la zone pour “travailler, aller dans un magasin/commerce, dans une galerie d’art, aller chez des amis ou aller au cinéma”, ce qui autorise à peu près tous les déplacements motorisés. Au contraire, les déplacements motorisés devraient se concentrer sur les usages vraiment indispensables, comme pour les artisans, les personnes à mobilité réduite ou les livraisons.

Le contrôle doit être automatique, par des bornes ou caméras de surveillance équipées du système de lecture automatique des plaques d’immatriculation (LAPI). C’est la clé du succès des ZTL en Italie : chaque véhicule est contrôlé sans aucune barrière et l’amende est directement envoyée au propriétaire du véhicule, comme pour les radars automatiques. Et c’est aussi paradoxalement ce mode de contrôle qui permet de la souplesse dans l’attribution des droits de circulation ponctuel. En effet, pour un besoin défini, il suffira de faire une demande via internet, pour une durée déterminée (ex un déménagement).

De plus, il est primordial  d’accompagner cette ZTL d’un nouveau plan de circulation à l’échelle de Paris, voire même du Grand Paris. En effet, la ZTL ne concerne que les arrondissements du centre, faisant craindre un report de circulation sur les arrondissements plus périphériques, et sur les boulevards entourant la zone. Un changement d’échelle permettrait également de supprimer le transit dans tout Paris, selon un plan « en marguerite » ; ce plan est ainsi conçu pour que, quand on pénètre dans Paris par un secteur, on doit obligatoirement, par le jeu des sens uniques, ressortir par le même secteur.

Enfin, cette ZTL ne doit pas être une mesure isolée : d’autres projets de ZTL doivent être prévus pour ne pas concentrer ces mesures uniquement sur le centre de Paris, moins peuplé que les quartiers plus périphériques. La multiplication des ZTL en Ile de France, avec un plan coordonné, permettrait d’une part de mieux faire connaître le dispositif, et d’autre part, de ne pas concentrer la mesure sur uniquement le centre de Paris. Ainsi les ZTL en Italie sont connues car elles sont nombreuses : beaucoup de villes en ont mis en place. Il est à noter que les périmètres bleus et rouges mis en place pour la circulation pendant les JO s’assimilent à des expérimentations de ZTL et gagneraient à être pérennisées et/ou multipliées sur d’autres secteurs, plus en phase avec les besoins des quartiers et des centres-bourg.

En conclusion, je me félicite de la mise en place de cette première ZTL en Ile de France, grâce à l’action résolue des élus parisiens écologistes. Elle aura un effet bénéfique pour le quartier, pour ses habitant.es et ses visiteurs et permettra d’encourager la marche et le vélo, et la réduction de la circulation motorisée. Cette ZTL ne peut être vue que comme un premier pas, qui pourra s’améliorer pour plus d’efficacité, et cette première doit, par la suite, se multiplier et se déployer sur tout le territoire francilien.

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© Tous droits réservés · Charlotte Nenner © Photos de campagne avec Charlotte: Eric Coquelin · © Illustrations: Alice Mettais Cartier